Temps de lecture : 8 minutes | Publié le 02/12/2022 | Jean (INCI Beauty)
Les nanoparticules peuvent exister à l’état naturel comme dans des fumées de volcan, des virus ou encore certaines poussières. Elles peuvent être produites par l'homme de manière non intentionnelle, c'est le cas des gaz d'échappements de nos voitures qui en contiennent (on parle de particules ultrafines). Et enfin, elles peuvent être produites de manière intentionnelle à destination de produits manufacturés comme des produits cosmétiques, c'est à ce dernier cas que nous nous intéressons ici.
Ils existent différentes méthodes de fabrication des nanoparticules qui peuvent être regroupées en deux catégories : l’approche « ascendante » (Bottom-up en anglais) et l’approche « descendante » (Top-down en anglais).
L’approche « ascendante » consiste à construire les nanoparticules ou nanomatériaux à partir de substances plus simples. Il s’agit d’assembler ou de positionner des atomes, des molécules ou des agrégats de façon précise et contrôlée. La structure des nano-objets obtenus est donc entièrement maîtrisée. L’approche « ascendante » met en jeux des procédés d’élaboration physiques et chimiques [5]. Pour les procédés chimiques, on retrouve les techniques sol-gel, les synthèses biochimiques, les réactions en phase vapeur regroupées sous le terme de CVD…Tandis que pour les procédés physiques, on utilise la décomposition catalytique, l’évaporation/condensation, les flammes de combustion…[1]
En opposition à l’approche « ascendante », l’approche « descendante » est destructive. En effet, les nanoparticules sont obtenues en réduisant -plus précisément en miniaturisant- des structures moléculaires. Les structures sont graduellement sous-dimensionnés ou fractionnés jusqu’à atteindre des dimensions nanométriques. Cette approche sollicite principalement des méthodes mécaniques : le broyage à haute énergie ou mécanosynthèse, la consolidation et la densification, les techniques de forte déformation…Par ailleurs, le contrôle de l’état nanométrique s’avère plus délicat [5].
Les chercheurs ne cessent d’optimiser les procédés pour trouver le meilleur compromis entre la qualité et quantité de nanoparticules fabriquées, la rentabilité et le respect de l’environnement. Nombre d'entre eux se tournent aujourd'hui vers la synthèse ascendante verte et biogénique pour sa faisabilité et la nature moins toxique de ses procédés de fabrication : il s’agit d’un processus de synthèse de nanoparticules qui utilise des extraits de plantes [3].
Grâce à leurs propriétés inédites, les nanoparticules représentent un marché stratégique. Il est aujourd’hui difficile de faire un recensement exact des nanomatériaux et nanoparticules utilisés. Cela s’explique d’une part par une perpétuelle augmentation des chiffres et d’autre part par le fait que ces « chiffres » soient récoltés sur la base de déclarations d’industriels ou d’hypothèses sur la composition des produits. Selon l’organisme StatNano, 6 064 produits sont commercialisés par 827 compagnies dans 47 pays. La production mondiale a été multipliée par 10 entre 2002 et 2011. Elle atteint près de 11 millions de tonnes en 2016, pour un chiffre d’affaire qui est passé de 1000 Milliards en 2015 [9].
La cosmétique représente l’un des secteurs les plus importants en termes d’application des nanoparticules. Elles améliorent les propriétés optiques, les effets de couleur, la tenue ou encore la texture des cosmétiques. Elles sont principalement utilisées comme colorants, épaississants, dispersants ou filtres UV (Ultraviolets). Les fards à paupières irisés ou nacrés, les rouges à lèvres ou les vernis à ongles longue tenue, les poudres de maquillage, les produits de soins pour la peau, les dentifrices…sont très souvent composés de nanoparticules. On peut citer l’exemple du dioxyde de titane (𝑇𝑖𝑂2) et de l’oxyde de zinc (ZnO) utilisés dans les crèmes solaires comme filtres UV mais également pour améliorer la résistance à l’eau, la brillance et la transparence de la crème [1][6].
Le secteur alimentaire sollicite les nanoparticules pour modifier la couleur, l’odeur, le goût, la fluidité, la texture ou la conservation des aliments. Plus de 300 nano-aliments ont été répertoriés et constituent un marché de plusieurs centaines de milliards de dollars dans le monde. Par exemple, les nanoparticules d’oxyde de silice améliorent les émulsions. Elles sont ajoutées dans le sel, les soupes, les laits, le chocolat, les crèmes en poudre et les hamburgers. En plus d’être utilisées pour améliorer les aliments, les nanoparticules peuvent également être incorporées aux emballages pour agir sur leur conservation, leur traçabilité et leur recyclage [6].
L’industrie textile fait appel aux nanoparticules pour améliorer ses produits en termes de propriétés thermiques, anti-pli mais également pour leur résistance à l’eau, au feu ou à l’abrasion. Souvent utilisées dans les vêtements de sports, les nanoparticules -notamment les nanoparticules d’argent- sont intégrées aux fibres afin de donner des propriétés bactéricides au tissu et de lutter contre les mauvaises odeurs [6].
Le secteur de l’automobile, l’aéronautique et l’aérospatial utilise les nanoparticules pour améliorer les matériaux et les performances de leurs produits. Les nanomatériaux permettent, par exemple, d’élaborer des pneumatiques plus durables et recyclables [5]. Concernant les peintures et revêtements, les nanoparticules accroissent la résistance à l’abrasion, aux rayures ou la corrosion, protègent des UV et améliorent leur durabilité. Dotées de propriétés hydrofuges, antimicrobiennes et autonettoyantes, elles agissent sans modifier la texture et l’application des formules [6].
Les nanotechnologies ont permis l’optimisation et la miniaturisation des produits du secteur de l’électronique et de la communication. Elles sont utilisées pour la fabrication de mémoires à haute densité et processeurs miniaturisés, de cellules solaires, d’écrans plats…Par exemples, les matériaux nanomagnétiques sont exploités pour l’entreposage de données [2][5].
L’industrie chimique et matériaux fait appel aux nanoparticules pour le développement de céramiques, de pigments, de poudres et catalyseurs multifonctionnels, de fils plus légers et plus résistants, d’inhibiteurs de corrosion... Les nano-argiles, par exemples, sont utilisées comme catalyse mais également pour leur dureté, résistance à la chaleur et résistance au feu [2].
Les nanotechnologies ont permis des grandes innovations dans le domaine médical. En plus d’avoir permis l’élaboration de nouveaux types de prothèses plus résistantes et biocompatibles, les nanotechnologies permettent des diagnostics médicaux plus précis ainsi que des traitements mieux ciblés et plus efficaces [6]. Les nanoparticules d'oxyde de fer telles que la magnétite (𝐹𝑒3𝑂4) ou sa forme oxydée la maghémite (𝐹𝑒2𝑂3) sont les plus couramment employées pour les applications biomédicales [2]. Bien qu’au stade de recherche, l’application des nanoparticules en médecine représente un grand espoir pour lutter contre de nombreuses maladies tels que les cancers.
La recherche et le développement des nanoparticules pour la défense militaire est également d’actualité. Toutes les catégories de nanoparticules sont exploitables pour élaborer ou améliorer les équipements militaires : poudres explosives, blindages, gilets pare-balle, capacité des batteries électriques, systèmes de surveillance miniaturisées… [1]
Un autre secteur de recherche et développement des nanotechnologies est le secteur énergétique. En effet, les chercheurs ont découvert que les nanoparticules sont de possibles sources énergétiques en raison de leur comportement optique et leur nature catalytique. Les nanoparticules peuvent être utilisées pour générer ou pour stocker de l’énergie [3]. Le dioxyde de titane (𝑇𝑖𝑂2) est exploité dans les cellules photovoltaïques pour ses propriétés optiques et photocatalytiques [2].
Les nanoparticules peuvent être également exploitées à des fins écologiques et environnementales. En effet, elles sont utilisées dans les traitements des effluents, pour la protection des organismes sensibles et la diminution des émissions de dioxyde de carbone (𝐶𝑂2), dans le procédé de production d’eau ultrapure, dans le procédé de récupération et recyclage des ressources existantes… [2][5]
Remerciements : Katy Velayoudon, Elève ingénieure à SIGMA Clermont, pour les recherches effectuées dans le cadre d'un stage de fin de 1ère année chez INCI Beauty.
Sylvie DUCKI, professeure de chimie organique à SIGMA
Sources :