Temps de lecture : 11 minutes | Publié le 16/03/2020 | Jean (INCI Beauty)
Qu’ils soient d’origine naturelle (huiles essentielles) ou synthétique, les parfums contiennent des centaines de molécules olfactives qui échappent à la liste INCI : ce qui n’empêchent pas certaines d’entre elles de provoquer des irritations ou des allergies difficilement identifiables.
Dans les listes INCI, ces molécules se cachent sous les termes suivants :
Le procédé le plus utilisé pour fabriquer une huile essentielle est l'hydrodistillation (distillation à la vapeur d’eau), il peut se pratiquer dans un Alambic. Cette technique ancestrale fait porter à ébullition un mélange de plantes et d’eau. Les cellules végétales éclatent sous l’effet de la chaleur, et libèrent des composés volatils odorants qui sont transportés par la vapeur d’eau. L’ensemble passe ensuite dans un système réfrigérant, et condense. L'huile essentielle est récupérée en se séparant de la phase aqueuse par différence de densité, dans un essencier. L’eau ayant servi à la distillation se nomme hydrolat, elle est faiblement chargée en molécule odorante et pourra être utilisée pour d’autres propriétés en cosmétique. Contrairement à ce que l’on peut penser, une huile essentielle ne contient aucun corps gras.
Depuis 2003 (JO du 11 mars), la réglementation européenne concernant les cosmétiques fait état de 24 substances (parmi les plus importantes) susceptibles de provoquer des réactions allergiques. Ces substances sont censées être les plus problématiques de la centaine de molécules présentes dans un parfum. Le règlement précise que leur présence dans un produit cosmétique doit être impérativement signalée, dès lors que leur concentration dépasse certains seuils, afin notamment de permettre aux utilisateurs d’identifier plus facilement leurs intolérances.
Les valeurs minimales de ces seuils sont les suivantes :
Au-delà de ces concentrations, chacune des 24 molécules odorantes doit être citée en fin de liste INCI sur le packaging (partie visible du consommateur avant achat). Cette obligation d'étiquetage se fonde sur un avis du Comité Scientifique des produits cosmétiques et des produits non alimentaires destinés aux consommateurs (SCCNFP) publié en 1999.
Une allergie de contact est différente d’une simple irritation puisqu’elle fait intervenir le système immunitaire de notre corps. Le simple fait d’être en contact à de nombreuses reprises avec une même substance peut faire que certaines personnes développent une allergie, et ceci, même après plusieurs années d’exposition. L’allergie suivra ensuite son porteur toute sa vie, latente, elle se déclenchera à chaque fois qu’il sera à nouveau en présence d’une quantité suffisante de molécules pour lesquelles il est sensible.
Les allergies de contact peuvent parfois déclencher de graves eczémas qui dégradent la vie de ceux qui les subissent ! De plus, l'utilisateur peut être confronté à ces 24 substances odorantes réglementées par l’Europe, dans de nombreux autres produits sortant du cadre de la cosmétique : les déodorants « d’ambiance », les détergents, la lessive ou encore les bougies odorantes en contiennent.
Le législateur européen a prévu dès 2005, s’inspirant de la même étude du SCCNFP, une réglementation équivalente pour les détergents. La directive (CE) n° 648/2004 entrée en vigueur fin 2005, introduit l’obligation de mentionner ces molécules allergisantes si elles dépassent 0,01% en poids (soit 0,1 g pour 1 kg) dans les produits détergents. Si vous êtes allergiques à l’une de ses 24 substances, il vous faudra donc bien scruter vos lessives et produits ménagers, afin d’identifier celles qui vous concernent sur l’étiquette. Notez, que ces mentions ne sont plus obligatoires, si le détergent est destiné à un usage professionnel. Il ne fait donc pas bon travailler dans une entreprise de nettoyage si vous êtes allergiques !
Dans un « avis » publié en 2012, le Comité Scientifique sur la Sécurité des Consommateurs (CSSC) relève que 16% des patients atteints d’eczéma sont sensibles aux molécules odorantes présentes dans les parfums. En outre, l’organisme estime (selon des études menées sur les différentes populations qui vivent en Europe), que 1 à 3% de nos concitoyens sont allergiques à ces mêmes molécules présentes dans les parfums et produits parfumés. Les zones du corps les plus ciblées par ces allergies de contact seraient les aisselles, le visage ou les mains.
Pour mieux s’y retrouver, nous avons réparti les 24 molécules allergisantes en trois groupes :
Dans ces tableaux, nous avons noté en gras les 12 substances les plus préoccupantes : ce sont celles qui sont les plus rapportées comme des allergènes de contact selon l’étude du SCCNFP de 1999.
Les allergènes suivants sont présents dans la nature. Néanmoins, ils sont parmi les moins utilisés en cosmétique.
EVERNIA PRUNASTRI EXTRACT Mousse de chêne. Cette substance prolifère sur les écorces des arbres, principalement sur les chênes. En cosmétique, elle est notamment utilisée dans le "Chypre", une base pour les parfums. |
EVERNIA FURFURACEA EXTRACT C’est aussi une variété de lichen mais bien moins utilisée que la précédente en cosmétique. |
Même si ces allergènes ne sont pas tous en gras, ce sont ceux qui sont le plus sujet à controverse aujourd’hui, parce que d’origine synthétique. Cela signifie qu’ils sont intégralement conçus en laboratoire suivant des procédés de fabrication la plupart du temps polluants et peu écologiques.
ALPHA-ISOMETHYL IONONE Senteurs florales, proches de celles de la violette ou de l'iris. |
AMYL CINNAMAL Senteurs proches du jasmin. |
AMYLCINNAMYL ALCOHOL Légères senteurs florales. |
HYDROXYCITRONELLAL Senteurs proches du muguet / lilas. |
HEXYL CINNAMAL Senteurs proches du jasmin. |
METHYL 2-OCTYNOATE Senteurs proches de la violette. |
Ces types de molécule sont présentes à l’état naturel. Lorsqu’elles sont utilisées dans des produits certifiés Bio, elles sont contenues dans les huiles essentielles. Comme vous pouvez le constater, 9 des 13 molécules préoccupantes selon l’étude du SCCNFP sont des allergènes naturels ou synthétiques.
ANISE ALCOHOL On retrouve cette molécule odorante à l'état naturel dans l'anis, le cumin, la tomate ou encore le miel. |
BENZYL ALCOHOL Naturellement présent dans de nombreuses plantes et fruits comme le Jasmin, l'ail et l'Ylang-Ylang, ou encore l'abricot, l'amande, la pomme et le cassis, cette molécule est très souvent utilisée en tant que conservateur, dans ce cas elle est limitée à 1% du total des ingrédients. |
BENZYL BENZOATE Le benzoate de benzyle est présent à l'état naturel dans le baume du Pérou et dans le baume de Tolu mais aussi dans les huiles essentielles de jasmin et d'ylang-ylang. A noter, que le Benzoate de benzyle fait partie du traitement de référence en France pour traiter la Gale (une maladie infectieuse de la peau). |
BENZYL CINNAMATE Le Benzyl Cinnamate est présent à l'état naturel dans le baume du Pérou, le baume de Tolu, le baume de Copahu ou encore le benjoin. |
BENZYL SALICYLATE Le Benzyl Salicylate est produit naturellement par de nombreuses plantes et est connu pour ses senteurs légères et balsamiques, voire musquées. C'est aussi un absorbant UV qui permet de stabiliser les produits. Les premières crèmes solaires étaient d'ailleurs produites à partir de cet ingrédient, mais il a été abandonné dans ce domaine depuis. |
CINNAMAL Le cinnamal est présent dans les huiles essentielles de Cannelle, d’Hyacinthe, de muscade ou de patchouli. |
CINNAMYL ALCOHOL L'alcool cinnamique est un agent parfumant que l'on retrouve naturellement dans la cannelle. Il est utilisé en cosmétique pour ses senteurs de Cannelle, jonquille, Jacinthe ou encore jasmin. |
CITRAL Le Citral est présent en quantité importante dans l'huile de citronnelle, mais aussi dans les huiles essentielles de verveine, d'orange, de citron... Il est utilisé comme composant aromatique en cosmétique pour ses odeurs de citron. Il est constitué par un mélange des deux isomères géométriques le géranial et le néral. |
CITRONELLOL Le citronellol est présent dans les huiles essentielles de géranium, de citronnelle ou encore de Rose. |
COUMARIN Le coumarin tire son nom de "cumaru" qui est le nom de l'arbre de Tonka (dans une langue amazonienne). En effet, ses fèves contiennent de 1 à 3% de coumarine. C'est W.H. Perkin en 1868 qui le premier a réussi à synthétiser le composé (réaction de Perkin). On le trouve également dans le miel, le thé vert ou la cannelle. Ses senteurs rappellent des odeurs de foin fraîchement coupé avec toutefois de nombreuses notes et nuances (noisette, amande, Vanille ...). |
EUGENOL L'Eugénol est un composé aromatique phénolique présent naturellement notamment dans le clou de girofle. Il sert à la fabrication de la vanilline et est utilisé dans les cosmétiques en tant qu'aromatisant. Il est employé en dentisterie en tant qu'analgésique, est utilisé dans les ciments chirurgicaux et certaines pâtes dentaires. Il est aussi doté de pouvoirs antiseptiques, aux Etat-Unis par exemple, on s'en sert de pesticides, classé dans la liste des "pesticides à risque minimum". |
FARNESOL Le farnésol est présent dans de nombreuses huiles essentielles comme celles de fleurs de tilleul ou d'acacia. Son nom proviendrait d'ailleurs d'une variété de cet arbre : l'Acacia Farnesiana. |
GERANIOL Le Géraniol, aussi nommé rhodinol, est un alcool monoterpénique que l’on trouve dans les huiles essentielles de géranium, de citronnelle mais aussi dans l'huile de rose et de Palmarosa. Il est utilisé en parfumerie pour son odeur de Rose. |
ISOEUGENOL L'Isoeugenol est présent naturellement dans l'huile essentielle d'ylang-ylang, de clou de girofle ou encore de Cannelle. Son arôme est à la fois sucré et épicé. |
LIMONENE Le limonène est un des composés les plus utilisés en cosmétique. Il tient son nom du citron dans lequel il est présent en quantité importante. En cosmétique, il est utilisé pour son parfum. Il existe sous deux formes différentes :
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LINALOOL Le Linalool est, avec le limonene, le composé aromatique le plus utilisé dans les cosmétiques. Il est présent à l'état naturel dans les huiles essentielles de thym, de lavande, de lavandin, de pin sylvestre ou de menthe poivrée ... On le retrouve aussi dans de nombreux extraits (citron, orange, verveine...). |
Suite à un avis du Comité Scientifique Européen (CSSC) qui date de 2012, la Commission Européenne a publié fin 2018 un document qui propose une nouvelle consultation concernant l'étiquetage de 62 allergènes supplémentaires en plus des 24 déjà mentionnés à l'annexe III du règlement des cosmétiques (CE 1223/2009). Environ 87 substances odorantes, certaines pouvant se regrouper, pourraient à l'avenir être indiquées sur l'emballage de nos produits cosmétiques.
Le but de cette nouvelle consultation est de régler un certain nombre de problèmes qui se posent à l’égard de ces molécules :